1. Une vie moderne


    Datte: 18/09/2017, Catégories: cérébral, Masturbation fgode, portrait,

    ... de vie parfaitement maîtrisée. Chose faite, cela ne l’empêchait pas d’éprouver tout de même, un bref sentiment de honte, de salissure de l’âme. Chaque mois Muriel achetait le même magazine. Elle avait conscience de l’absurdité de son contenu éditorial mais elle se tolérait cette petite faiblesse depuis si longtemps qu’il ne lui arrivait que très rarement de se mortifier pour cela. — Merci, Madame. À bientôt. Sur la couverture, en splendide papier glacé polychrome, grimaçait une déesse irréelle. On pouvait y lire en petits caractères, assez voyant néanmoins :Elles le font et elles l’avouent ! Elle ferma le magazine, le jeta au pied de son lit, éteignit la lumière et se mit à méditer. L’article en question portait sur les pratiques auto-érotiques féminines. Il était composé d’une introduction idiote et mièvre, d’une intervention ridicule et débilisante d’un prétendu psychologue et de trois témoignages de lectrices. Bien entendu, les trois lectrices incarnaient au mieux trois positions radicalement différentes : les trois positions que le rédacteur, auteur sans doute de l’introduction, voulait exhaustives et exemplaires dans ce type de pratique intime. Il y avait celle qui avouait une fébrilité maladive pour cette activité, une autre, plus réservée dans ses pratiques mais plus exhibitionniste et gourmande dans ses descriptions, enfin il y avait une homonyme :Muriel, 35 ans, célibataire, sous-directrice aux ventes dans une grande entreprise. Son témoignage avait troublé Muriel ...
    ... : d’une part, cette Muriel affichait et revendiquait, même, une pratique bien plus importante qu’elle. D’autre part, si cette Muriel donnait des raisons immédiates et hygiénistes à ses pratiques, elle n’hésitait pas à leur donner aussi, plus de profondeur, de perspectives, de relief, pour sa vie professionnelle, bien sûr, mais même – faible part, il est vrai dans son discours - pour sa vie personnelle. Ce trouble dura plusieurs jours et à chacune des lectures de ce témoignage, Muriel trouvait, dans les raisons de son double, les raisons d’agir comme son double. La vie sexuelle de Muriel en fut alors perturbée et cela de manière manifeste. Lorsqu’elle conversait avec Christiane, à mots feutrés, dans un langage euphémisé jusqu’à l’absurde, elle laissait entendre qu’il fallait savoir prendre et éprouver du plaisir, quelle qu’en fût la nature, dans un souci d’équilibre et de responsabilité, bien sûr. Elle avait d’ailleurs augmenté significativement ses pratiques solitaires pour être en harmonie avec la philosophie développée par son double mais, elle était tout de même restée réservée sur le seuil fatidique de l’intensité sensuelle admissible que confèrent ces pratiques : les neurones, irrémédiablement… Elle conservait pieusement le magazine, un peu honteuse, comme si celui-ci n’était qu’un bas spécimen de ces revues pornographiques que l’on cache soigneusement au fond de l’armoire, autant pour les soustraire aux regards des autres, que pour nier leur importance dans sa propre ...
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