L'histoire de Rebecca Reisenbach
Datte: 22/02/2021,
Catégories:
fh,
jeunes,
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Oral
nopéné,
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Clarisse savait écrire avec élégance. Deux nouvelles qu’elle m’avait fait lire au lycée étaient prometteuses quand j’y songe. Seulement sa plume traçait des lettres trop grandes, trop rondes ou trop crochues, à la hâte, qui m’étaient d’autant plus désagréables ce jour-là. Strasbourg, 3 janvier 2003Cher Florent,Ne sois pas surpris que je t’écrive. J’ai toujours ton numéro, mais il y a des questions qui ne peuvent être posées au téléphone.Comme tu le sais peut-être, j’ai vu Brunehilde à Longwy au Nouvel An. Elle m’a paru très triste. Elle a tenu des propos enflammés et incohérents sur votre relation. Je n’ai pas eu le temps de comprendre où vous en étiez.Je pense qu’elle a besoin d’aide alors j’aimerais que tu m’éclaires. Que s’est-il passé entre vous ? Il me faut ta version. Je t’en remercie d’avance. Ne me réponds pas si ma demande te met mal à l’aise, mais tout de même, pense à elle.Clarisse Je récris de mémoire cette lettre, brève et directe, que je n’ai plus. Depuis, la vie ne m’a jamais offert de revoir son auteur. Brunehilde non plus. Le plus navrant pour moi est de ne plus savoir à quoi a ressemblé notre dernière rencontre. Penser à elle, mais comment ? Devais-je ne rien dire ? N’était-ce pas ce que Brunehilde aurait voulu ? Ou plutôt, devais-je tout étaler ? Qu’avait-elle pu raconter, de quelle manière ? Si j’avouais seulement une partie ? Serait-ce au moins crédible par rapport à sa version des choses ? Je croyais trouver des réponses auprès de Clarisse. – Je suis ...
... désolé de pas avoir encore répondu, mais je viens de recevoir ta lettre. En fait je ne suis plus à Nancy. – Ah, Brunehilde ne m’avait pas dit. T’es où ? – À Paris. – Tu comptes me répondre ? – Oui, Clarisse. – Écris-moi. Raconte-moi tout. C’est mieux, non ? – Oui. Probablement. Je n’en avais aucune idée au fond. Nancy, drôle de souvenir à présent. J’y ai passé à peine l’automne. Envoyé d’abord à Strasbourg, j’y ai vu Clarisse. Elle m’a appris que Brunehilde était professeur de français dans notre Meurthe-et-Moselle. Je ne me suis jamais vraiment installé à Nancy, j’y ai vogué d’hôtel en hôtel. Je suis déjà las en débarquant du train dans cette ville que je n’ai pas vue depuis mon adolescence. Je parcours, lourdement chargé, des rues sombres jusqu’à un hôtel luxueux de la rue des Carmes. Il l’est trop sans doute : je dois n’y rester qu’une nuit. Puis on me fera alterner entre un autre hôtel collé à la gare, très confortable, et un hôtel plus quelconque de la rue Saint-Jean, que je déteste, et dont j’ai oublié le nom aujourd’hui. Je me rappelle ne jamais être resté dans la même chambre plus d’une dizaine de nuits. Et ce barda qu’il fallait déplacer à chaque fois de l’hôtel vers le bureau, du bureau vers mon nouvel hôtel. Comme un pendule, place Thiers, rue Saint-Jean, place Thiers, rue Saint-Jean… Mon lieu de travail est aussi impersonnel que peuvent l’être des locaux pour une seule personne. De prime abord cela paraît beaucoup d’espace. Mais si grande qu’elle soit, la pièce ...