L'histoire de Rebecca Reisenbach
Datte: 22/02/2021,
Catégories:
fh,
jeunes,
hotel,
entreseins,
Oral
nopéné,
nostalgie,
regrets,
... brouhaha. Mes autres souvenirs du dîner sont flous. Autant que je puisse dire, nous ne prenons qu’un plat et de l’eau. Rue de Cronstadt, Brunehilde semble s’éclipser comme l’autre soir, hésiter, puis s’arrêter dans l’entrebâillement de la porte. Elle se tourne vers moi pour me suggérer de m’engouffrer. Des couloirs froids mènent à un appartement surchauffé. – Assieds-toi, je t’en prie. – Merci. – Je suis partie en oubliant que j’avais monté le chauffage. Désolée. – C’est rien. Posé dans un coin de son canapé, je l’écoute sans rien dire, les manches de chemise retroussées. Elle mêle des souvenirs du lycée avec sa vie d’aujourd’hui, encore dans un lycée. Le faible éclairage rend ses prunelles noires. Je sirote un muscat. Notre voyage de classe à Rome, l’hiver avant le baccalauréat. C’est mon meilleur souvenir d’elle. Car elle me préférait Thomas, et Thomas n’était pas à Rome. Quand on se partageait notre musique dans le fond du bus, quand elle me parlait d’elle, ou de n’importe quoi, en marchant dans les rues de Rome, à Ostie, à Tivoli, j’avais le sentiment, erroné, que nous allions nouer enfin l’idylle dont j’avais pu rêver. Elle, ensuite, est allée en khâgne et a réussi Ulm. Pour tout cela. Elle habite un bel appartement, d’où elle marche tous les matins vers un emploi stable et rassurant. C’est déjà un peu la fin de la course. Il n’est qu’un peu plus de vingt et une heures. J’ai envie de rester. – Tu n’as jamais su mais… Rebecca… – Oui, Rebecca ? – Tu aurais dû l’entendre ...
... parler de toi. Elle disait dans un soupir : — Ah ! Florent… Que ne me l’avait-elle avoué à l’époque. Elle était si mignonne. Je ne devais pas être le seul jouvenceau à regarder avec envie les formes de cette petite blonde. Était-ce sa peau ingrate, ses origines, sa timidité ? Personne n’approchait Rebecca Reisenbach. Elle avait une histoire malheureuse. Délaissée par un père français qui ne lui avait pas légué son patronyme, elle avait grandi en Allemagne, le pays de sa mère. On ne savait pas pourquoi adolescente elle était venue vivre chez ses grands-parents, ni ce qu’était devenue madame Reisenbach. Le français plus simple et plus scolaire que le nôtre mettait Rebecca toujours un peu à part. Elle n’avait pas d’amie très proche. Comme c’était une bonne élève, faisant partie de la meilleure société du Haut-Longwy, nul ne cherchait à savoir ce que disait son regard un peu égaré. – On voulait te jouer un tour à Rome. On voulait qu’elle t’attire dans la chambre d’hôtel. Et on voulait vous surprendre. – Nous surprendre ? Tiens donc. C’était machiavélique. – Non, au contraire, ça n’avait aucune chance de marcher. Pas moyen qu’elle te coince sans que tu nous voies. L’emploi du temps de ce voyage de latinistes d’un lycée catholique ne s’y prêtait pas. Nous devions au professeur de latin une organisation d’autant plus implacable que sa fille, Clarisse, était des nôtres. Un soir j’avais pu me glisser dans cette chambre, certes, où elles étaient en pyjama. Elles devaient me trouver bien ...