1. En votre âme et conscience


    Datte: 24/08/2021, Catégories: nonéro, policier,

    ... Pensez, tuer quelqu’un à main nues ! * En prison, je m’étais lié avec un « vieux de la vieille » ; trente-cinq ans, dont quinze derrière les barreaux, il lui en restait encore six à faire avant d’espérer une remise de peine. Il avait tabassé un flic lui aussi. Le flic en question lui cherchait des embrouilles. — C’t’enculé, il me cherchait. Tous les jours il m’demandait mes papiers, me fouillait comme si j’avais chouré la Joconde. Pis un jour, j’étais avec ma p’tite sœur, v’là-t-y pas que c’t’enculé se met à la fouiller aussi, ce gros porc. J’ai pas réfléchi, j’ai tapé.— Et alors ?— Ma petite sœur criait « Rachid, arrête ! » mais il était trop tard. Maintenant il est juste bon à remplir des paperasses à la préfecture et il a mangé sa soupe avec une paille pendant un an.— Et tu t’es retrouvé ici pour un bail.— T’as tout compris. Toi, t’as rétamé un flic ? Et sa meuf ?— Damien, oui, je suis sûr de l’avoir tué. Laurène, je ne sais plus. Tout s’embrouille dans ma tête.— Comment tu l’as estourbi ?— Lui ? À coups de poings.— Wah, le délire ! Je te propose un truc : les nouveaux ici se font accueillir à coups de bites dans le cul, et aussi à coups de lattes dans la gueule. Je te protège, tu me protèges aussi, tu es baraqué. T’as une réputation d’enfer, tu ne devrais pas trop avoir d’embrouilles. Méfie-toi tout de même des dealers, que des enculés.— Merci.— Si tu peux m’avoir un rencart avec ton avocate, te prive pas, joli petit lot. C’est ainsi que je passai près d’une année avec ...
    ... Rachid. Pour lui, le monde se divisait en deux parties bien distinctes : d’un côté les enculés, de l’autre nous deux. Plus quelques potes et sa sœur. Il y eut bien quelques altercations, quelques coups de boules échangés. Nos poings faisaient hésiter les plus hardis. Je ne fus guère ennuyé. * Lors du début du procès, nombre de flics étaient présents, venus honorer la mémoire de leur collègue. Si Laurène sortait tout juste du coma, elle n’en avait pas fini avec les traitements. Les médecins semblaient optimistes, mais elle était toujours alitée, ne parlait toujours pas, était plus ou moins dans les brumes et nécessitait des soins constants. La salle était pleine lorsque j’y entrai encadré par deux gendarmes. Ils avaient restauré la vieille salle du tribunal, rien que pour ma pomme. Un truc tout lambrissé. Le plafond se lézardait et des plaques de peinture pendouillaient dans les angles. Le grand lustre paraissait bien terne. La salle d’audience ressemblait à la justice, un peu de couleur pour faire beau, mais le dessous sentait le moisi. Outre les policiers, de nombreux journalistes se pressaient là, des curieux ou des charognards aussi, que l’odeur du sang attirait. Il faut dire que j’étais devenu une vedette. Mon affaire faisait la une de la presse. Des reporters étrangers venaient d’un peu partout. Avant de partir, Rachid m’avait serré dans ses bras. — Courage, ne les laisse pas te démonter. Te fais pas d’idées, c’est pas parce que je te fais un câlin qu’on est des tapettes. ...
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