En votre âme et conscience
Datte: 24/08/2021,
Catégories:
nonéro,
policier,
... Nous éclatâmes de rire, mais ses encouragements brutaux me réchauffaient le cœur. Le greffier, une bonne femme à lunettes, annonça la Cour. Tout un cérémonial se déroula sous mes yeux lorsque ladite Cour entra. Une femme en rouge, la présidente, ses deux accesseurs, déguisés eux aussi en camions de pompiers, ainsi que les jurés. Des hommes et des femmes, des gens banals. Ils se rangèrent en rang d’oignon sur ma droite. Sur ma gauche, le public, que je sentais agressif envers ma pomme. En face, l’avocat général. Un grand maigre barbichu, l’air revêche. Je croisai son regard : mon sort semblait scellé. Je me demandai même pourquoi faire un procès. Au centre de la salle, l’arène. Là où se dérouleront les auditions des témoins. Et en dessous de moi, mon avocate. Elle me semblait bien frêle et bien petite face à toute cette armada. Je sentais les ondes négatives affluer vers nous. Son patron n’avait même pas daigné venir l’aider. Elle se recroquevillait là, petite chose noire parmi tout ce rouge sang. Tout d’abord, je dus me présenter. Comme s’ils ne me connaissaient pas. — Michel Lambert, 35 ans, né à Strasbourg. Professeur de physique au lycée. Célibataire. Pour l’instant j’habite en prison, mais avant je louais une petite maison dans la banlieue de Lyon. Au début, des gens dont je ne me souvenais même pas avoir croisé la route vinrent expliquer ma personnalité. Ma mère vint témoigner ; la pauvre vieille sanglotait. Des anciens profs aussi racontèrent ma vie. Bon élève, gentil ...
... fils. J’étais paraît-il un bon copain. Des amours de jeunesse sorties de ma mémoire apportèrent un éclairage sur ma petite personne. Petite personne si on veut : un mètre quatre-vingt-quinze, quatre-vingt-dix kilos tout de même. Un de mes anciens condisciples fit son petit effet à la barre : — Il n’était pas si gentil que ça. Il avait des accès de rage ; colérique, si vous voulez. Quand il se foutait en rogne, ça déménageait. Il est doté d’une force assez étonnante. Je savais pourquoi ce crapaud était venu baver sur moi : en terminale, sa petite amie l’avait largué pour moi. Il m’en voulait encore, ce con ! Faut dire aussi qu’avec sa gueule, il ne devait pas y avoir foule dans son lit. Cette première journée de procès se termina sur un sentiment mitigé. Mon portrait n’était pas terrible. Mon avocate ne sembla pas perturbée et n’intervint guère dans les débats. L’avocat général ne s’en priva pas, lui. Seconde journée du procès ; description des victimes. Couple sans problème, s’aimant profondément, désirant selon les dire des uns et des autres fonder une famille, avoir des enfants. Elle, Laurène, 30 ans, prof au même lycée que l’accusé. Lui, bon flic, 35 ans, apprécié de ses collègues et de ses supérieurs. Le gentil couple de Français moyens. Ils avaient un ami, presque un frère : Michel Lambert ! Moi. Moi qui justement, selon les dires des psychiatres qui m’examinèrent, étais amoureux de Laurène. Je faisais, selon eux, une fixation sur ma collègue, sur la femme de mon ami. Le ...