Où sont passés les poivrons jaunes ?
Datte: 19/06/2017,
Catégories:
caférestau,
nonéro,
amiamour,
consoler,
... bataille pour pouvoir compter le nombre de macchabées dans mon cœur ! — J’en sais rien, j’en sais foutrement rien, Hélène, finit-il par admettre. Et toi… jamais ? J’ai ouvert de grands yeux. — Moi quoi ?— Tu n’y as jamais pensé ?— Pensé à quoi ?— Arrête, merde ! a hurlé Fabrice. Ça avait été à mon tour de sursauter ; nous nous sommes fixés à nouveau, et il y avait ce fossé entre nous, d’un coup, qui me faisait pleurer de rage au plus profond de mon être. — Je le répèterai pas, ça suffit pour ce soir, reprit alors Fabrice d’un ton enroué. Allez, descends.— Non.— Descends, j’ai besoin d’être seul !— Non, putain ! Je vais pas descendre de ta foutue bagnole sans qu’on ait parlé de ça ! ai-je crié.— Dégage Hélène ! fulmina-t-il. Tu vois pas que je ne sais plus où me mettre ? Je l’ai enveloppé d’un regard hagard. Et moi ? Moi ! Je ne savais plus quoi faire ! Effarée, j’étais assaillie, pressée de pensées plus ou moins délirantes. Devais-je en rire, désamorcer cette crise en prenant ça au second degré ? Mais si c’était sérieux, ne risquais-je pas de le vexer à mort ? Devais-je me montrer compatissante, lui dire que ça ne faisait rien, qu’on pouvait bien continuer comme avant, du moment qu’on n’en parlait plus ? Devais-je… je ne sais pas… coucher avec lui ? L’embrasser, tout du moins, pour vérifier… vérifier quoi ? Qu’il n’y avaitrien ? Je le savais déjà, qu’il n’y avait rien… de mon côté, en tout cas. Mais bon, si lui pouvait s’apercevoir de la même chose du sien… ce seraitvraiment ...
... appréciable. Devais-je prévenir mon mari ? Et sa femme, Géraldine ? Qu’avait-il espéré en me débitant cette malheureuse petite phrase qui venait de faire exploser notre relation ? Que j’allais soudain m’apercevoir qu’il était mon Chandler, et moi sa Monica ? Ou qu’on était ces foutus Harry et Sally ? Une de ses mèches était retombée, follette, sur son front. J’ai lutté de toutes mes forces pour ne pas la repousser avec les autres. Je l’aurais fait, avant. À présent tout était gâché, empoisonné, contaminé. Je me mis à pleurer, submergée par toutes ces émotions qui me broyaient. — V’là qu’elle chiale, maintenant, marmonna Fabrice après avoir jeté un coup d’œil dans ma direction. On se taisait tous les deux. Mes sanglots irrépressibles et mes reniflements étaient autant d’appels sans échos vers l’homme que j’avais passionnément aimé d’amitié pendant de si nombreuses années. Fabrice a soupiré, puis m’a dit, doucement : — Écoute, je te promets qu’on en reparlera. Mais les autres… m’attendent. Alors… sors, s’il te plaît. J’ai encore hésité deux minutes, puis je suis descendue de la voiture, toute tremblante et pleurnicheuse. J’ai fait quelques pas vacillants, puis les bras ballants, je suis restée là, sur le trottoir. Paumée. Je m’attendais à ce que Fabrice reparte sur des chapeaux de roues, mais il est resté là, lui aussi, il m’a regardée, longtemps, à travers le pare-brise. Et ce regard était si intense que nous ne sommes pas parvenus à détourner les yeux. D’un coup, il est sorti ...