Perdus
Datte: 25/10/2018,
Catégories:
nonéro,
aventure,
sf,
... Mais voir quoi ? Il n’y avait rien à voir… *** Je me rendormis finalement, et lorsque je m’éveillai, toujours au milieu des deux femmes, j’étais fermement résolu à essayer de laisser flotter un fil pour deviner la direction du courant. M’extrayant des bras chauds qui me ceignaient, je me saisis de la tunique trouée dont Alys s’était vêtue en s’échappant de Tal-Mania et cherchai à en arracher quelques fibres. Au second essai, j’en tirai un brin de près d’un mètre. Il s’agissait de ne pas le perdre. Je l’enroulai à mon poignet, et recommençai la manœuvre. Le bruit du tissu déchiré éveilla rapidement les deux femmes. Alys s’étonna un instant de découvrir Anika couchée à côté d’elle, puis de réaliser que j’avais retrouvé nos vêtements et enfin de constater que j’étais en train de déchirer le sien. — Qu’est-ce que tu fais ?— Des fils. Je veux trouver où va le courant. Et vaille que vaille, nous le suivrons.— Tu veux replonger dans le lac ? s’alarma ma compagne.— Tout vaut mieux que de pourrir ici.— C’est de la folie ! fit Anika. Tout ce que tu gagneras, c’est d’aller pourrir un peu plus loin dans les entrailles de la terre. La ville est au-dessus de nous. C’est en haut qu’il faudrait pouvoir s’échapper.— Vous avez déjà essayé ? demanda Alys.— Oui, nous avons tout essayé ! Nous avons escaladé toutes les parois, suivi toutes les cavernes, en vain. Mais j’ignorai ses avertissements funestes et me consacrai tout entier à mon entreprise, jusqu’à avoir une vingtaine de morceaux enroulés ...
... à mon poignet ou à ma jambe. Et je nouai bientôt une à une les extrémités de ces épais brins de filasse, formant une sorte de fine cordelette de près de quinze mètres de longueur. Anika me guida ensuite jusqu’au bord du lac, et j’y jetai ma ficelle, attachant l’autre bout à mon poignet. Et j’attendis. — Et alors ? Comment sauras-tu dans quelle direction part ton fil ?— Il faudra le sentir. Nos voix et mes micmacs avaient dû attirer les hommes, car je les entendis soudain derrière moi s’adresser à leur compagne. — Qu’est-ce que vous faites ?— Il cherche le courant. Il veut s’enfuir par le lac.— Vous n’avez rien qui puisse faire office de radeau ? demandai-je à tout hasard.— Tu crois pas que si on avait ça, on s’en serait déjà servi ? Alys s’approcha pour me chuchoter à l’oreille : — Tu veux vraiment qu’on retourne dans l’eau ?— Tu préfères rester ici ? Le souffle de son soupir caressa mon épaule. Devant moi, je sentais la ficelle dévier lentement sur ma gauche. — On y va ? fis-je d’un ton résolu. Moi non plus, l’idée de replonger dans ces eaux invisibles ne m’enchantait pas, mais je refusais de me résigner à cet emprisonnement sordide, à vieillir là avec ces morts vivants sans espoir. — Tu es complètement fou !— Hors de question que je plonge là-dedans !— Et pour aller où ?— On va suivre le courant. Tu viens, ma puce ? Pour donner l’exemple, je m’avançai lentement dans l’eau après avoir enfilé mes vêtements. Alys m’imita à contrecœur. Les autres n’avaient pas l’air décidés. — ...