Reflux
Datte: 22/06/2017,
Catégories:
nonéro,
... congénères. Alors que le soir tombait, après une longue journée de marche, Sam s’arrêta dans une ville un peu plus grande qui jouxtait la barrière de la périphérie. Il crevait de faim. Dans ces endroits, il savait où trouver à manger. Il fallait juste attendre un peu que la nuit chasse le soir. Il s’installa avec une dizaine d’autres sur le parking d’un drive-in. Et quand un employé luisant de sueur sous sa visière déversa les restes dans une grande poubelle verte, il se jeta avec rage et détermination sur le butin tiédasse. Son bâton moulinait dans l’air, écartait la concurrence. Son accoutrement aidait, les autres y pensaient à deux fois avant de lui renvoyer ses coups. Mais ils s’y résolurent. Et Sam dut rapidement battre en retraite, la soutane pleine de vivres. Il mangea vite, accroupi. Sur ses gardes. Trois hamburgers et des frites froides. Nappa le tout de ketchup. Puis se rendit aux toilettes de la gare routière et but longuement au robinet une eau trop froide. Relents d’urine. Poils dans les cuvettes. Ça aurait dû le dégoûter, à une époque ça l’aurait tout simplement révulsé. Souci de l’hygiène. Lumière blanche / Pièce blanche. Le reflet dans le miroir n’était pas gratifiant. Pâleur, yeux cernés. Hagard. Bon, la capuche c’était toujours ça de pris. Il marcha dans la nuit tiède, tenta d’entrer dans plusieurs immeubles sans succès. Digicodes / Interphones. Portes de métal. Finalement, il eut de la chance et parvint à pénétrer une vieille construction délabrée. Monta ...
... les étages et se hissa sur le toit. « Il n’était pas si mal », se dit-il en s’adossant à une citerne d’eau rouillée. « Quelle sacrée vue quand même » ! Il se grisa du spectacle des lumières dansantes, des feux rouges des voitures sur le gigantesque circulaire. C’était beau. Non, ça ne l’était pas. Difficile de mettre le doigt dessus. À force de chercher, il finit par s’endormir. À nouveau la voix apaisante de l’homme : « Des actes de la sorte il y en a beaucoup. Ça n’est pas de votre faute, Sam. Ted K avait ses problèmes. Qui ne sont pas les vôtres. Les choses vont s’arranger ». Il aurait aimé lui dire à cet homme en blouse qu’il ne se souciait guère de ce Ted K, que le problème était justement qu’il s’en foutait royalement. Que vraiment, le problème était ailleurs. Il y eut un autre nom qui traversa son sommeil. Nelly. Nelly W. Montre-moi ton visage, Nelly, suppliait-il à genoux devant un monde opaque. Mais seuls quelques mots giclaient de la masse obscure. « Je suis désolé, Madame W, je suis vraiment désolé, mais je n’y arrive pas. Je n’y arrive vraiment pas ». Puis le rêve mua. Quelque chose de bleu et d’agréable. De si réconfortant. Il nage. Ses bras accrochent l’eau. Vite. Tonique. Longtemps. Suit les lignes de fond. Il y a des verrières gigantesques qui dévorent la lumière. Plisse les yeux derrière les lunettes. Bat ses pieds en rythme. Survole son ombre. Il est sa propre dynamo. Sa bouche relâche l’air doucement. Les bulles remontent. Des bulles sonores. Et dedans des ...