1. Reflux


    Datte: 22/06/2017, Catégories: nonéro,

    ... la tente, ôta sa blouse bleue dévastée de taches et de souillures. Enfila un ensemble noir qui s’avéra après un examen approfondi être une soutane. Il fit la moue. Il y avait également une cape lourde de la même matière. Vraiment idéal, rien à dire. Autant marcher à poil, ça serait moins voyant. L’ensemble était usé mais semblait relativement propre. Sam demanda tout de même à Silian s’il n’avait rien d’autre à lui proposer. « Non, ça, on ne sait pas quoi en faire. Tu as de la chance ». Sam maugréa « On peut voir ça comme ça, oui ». Il enfila la tenue et malgré la chaleur, sans bien comprendre pourquoi, passa la cape par-dessus ses épaules. Puis remercia le gamin. Lui donna l’accolade. — Vous m’avez été précieux. Vraiment. Sam fit claquer sa langue, conscient qu’il lui manquait quelque chose dans la bouche. Mais quoi ? En sortant, le gamin lui lança un bâton de bois. Une canne abîmée mais solide. — De la part de Kevo, il dit qu’un bâton c’est toujours utile. Et que tu en auras besoin. Sam grimaça. — À part me faire ressembler au Christ, je ne vois pas non. Mais enfin, c’était aimable. Il remercia encore. Et à la réflexion, tandis qu’il plantait sa canne dans le sol lâche de la décharge, il se dit que les mots de Kevo avaient du sens. Il traversa vers le nord, droit devant lui, par où il était arrivé. Il y avait des livres qui jonchaient le sol, des journaux qui décollaient péniblement à hauteur de jambes. De la nourriture en décomposition. Du métal rouillé. Des batteries de ...
    ... voiture, des piles. Tout cela allait se mêler en une masse de matière informe. Sur son chemin, dans de petites rigoles qui creusaient les détritus, coulait un liquide brunâtre. Sam avisa la ville au loin, leva un regard fatigué vers le soleil blanc, passa quelques postes d’observation. On l’insulta. Des adultes lui demandèrent de dégager et vite. Dès lors, il ne se retourna plus. Il fit le chemin inverse. Profondément, il ressentait le besoin de revenir vers la ville. Il marcha longtemps, transpirant sous sa cape et sa soutane. Sur les larges voies de la grande périphérie, son bâton frappait l’asphalte. Il s’arrêta sur des aires aménagées ; dans des arches se désaltéra. Colla son front au double vitrage. Les voitures grossissaient depuis l’horizon. Passaient sous ses pieds. Le vacarme était contenu par l’imposante structure. Puis il coupa à travers une forêt disciplinée qui laissait paraître le haut des premiers immeubles à travers ses branchages. L’été aidant, une certaine luxuriance tenait l’endroit. Il y avait même des chants d’oiseaux. Plusieurs fois, il aperçut au loin les tours du quartier d’affaires qui larmoyaient sous la chaleur. Grand était son désir de les rejoindre / Grand aussi le dégoût qu’elles lui inspiraient. Il traversa des petites villes satellites aux murs pâles. S’arrêta près des fontaines publiques. Il puait, il en avait conscience. Les gens le regardaient avec défiance. Puis il repartait comme il était arrivé, ressentant sans honte le soulagement de ses ...
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